• http://arxiv.org/PS_cache/math/pdf/0608/0608770v2.pdf

    Philosophiquement parlant on a ici la réalisation (plus de 70 ans plus tard) d'un mouvement de l'intelligence que Brunschvicg signalait (pour s'en féliciter) dans le "Progrès de la conscience":

    "un trait fondamental commun aux deux théories de la relativité c'est qu'elles sont indivisiblement physiques et mathématiques, sans qu'on puisse indiquer à partir de quel point la raison et l'expérience auraient commencé de collaborer ni à quel moment leur collaboration pourrait cesser. La géométrie est physique autant que la physique est géométrie. Autrement dit le caractère de la science einsteinienne est de ne pas comporter une phase de représentation imaginative qui précèderait la phase proprement mathématique...il n'y a pas de contenant défini en dehors du contenu : l'espace et le temps doivent être gagnés à la sueur de notre front. La continuité du labeur humain les tisse inséparablement l'un de l'autre"

    et plus loin :

    "le projet cartésien de mathématique universelle (= "mathesis universalis") signifiait déjà ce que Pythagore et Platon semblent avoir pressenti , que l'intelligence des choses commence et finit avec leur mesure; mais l'interprétation exacte du primat de la mesure, et par suite de la vérité même du savoir scientifique, demeuraient voilées tant que l'opération de mesure se dissociait en deux moments supposés séparés : d'une part la forme du raisonnement mathématique, idéalité abstraite du mesurant, et d'autre part la matière de l'expérience physique , réalité concrète du mesuré.

    En fait Descartes avait échoué dans le passage du premier moment au second.... mais Newton n'était pas moins en échec; car après avoir lié la mécanique rationnelle à l'absolu divin de l'espace et du temps, il se reconnaissait impuissant à établir de façon positive la cause de la gravitation....

    c'est par l'élaboration d'un type différent d'architecture que les théories de la relativité ont remédié aux défauts symétriques et contraires de l'édifice cartésien et du newtonien..par là peut on dire la théorie de la relativité confère à la physique mathématique l'unité du style classique"

    Ceci rejoint l'analyse philosophique préliminaire du papier référencé en début d'article, qui met en opposition Descartes et Newton par rapport à la conception galiléenne de l'espace comme relatif aux "corps massifs".

    Mathématiquement, et grâce à la théorie des catégories (que Brunschvicg ne pouvait pas connaitre puisqu'elle est apparue en 1945), et spécifiquement à celle des groupoïdes, une notion plus primitive que celle d'espace temps est formée : le groupoïde des corps massifs ayant comme morphismes les vitesses relatives entre ces corps.

    il s'agit d'un "pair groupoid" dans le langage technique du papier, c'est à dire d'une groupoîde où tous les objets sont nuls (à la fois initiaux et terminaux).

    Le processus que Brunschvicg applaudissait, consistant à s'affranchir de tout germe d'imagination réaliste d'espace et de temps, est donc ici poussé un cran plus loin.... les esprits chagrins parleront eux d'abstraction inutile....laissons les se lamenter !


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  • Nous vivons l'époque de l'éclatement de la science en une multitude de technosciences, concomitante à la disparition des "scientifiques-philosophes" dont l'archétype paradigmatique est Albert Einstein (comme aussi d'ailleurs Heisenberg). Il en reste cependant, par exemple Roger Penrose, lire notamment ce cours :

    http://online.itp.ucsb.edu/online/plecture/penrose/oh/02.html

    C'est le diagnostic que fait le physicien Lee Smolin dans son récent ouvrage "Rien ne va plus en physique", où il pointe aussi l'absence de toute avancée théorique en physique depuis 25 ans (la dernière grande avancée étant le modèle standard).

    Cette situation (déplorable à tous points de vue, notamment en ce qu'elle s'accompagne d'une perte de toute conception universaliste de la raison, remplacée par l'entendement pratique, calculateur et utilitaire, ce qui mène au nihilisme généralisé) résulte d'une évolution décelable dès la fin du 17 ème siècle avec la disparition de l'idée de "Mathesis universalis" (née chez Descartes et Leibniz, et que l'on peut faire remonter à Platon et Proclus) et la séparation complète entre sciences et philosophie qui suivra son cours au 18 ème siècle et éclatera au 19 ème siècle "positiviste".

    Ceci conduit justement à la séparation entre philosophie de la Nature hégélienne et schellingienne et science officielle (physique) : on sait le peu de cas que font les philosophes modernes (pour ne pas parler des scientifiques Mort de rire)  de la philosophie de la Nature de Hegel, qui est en quelque sorte le "rejeton scandaleux" de cette philosophie (voir là dessus le commentaire à la Phénoménologie d'Alexis Philonenko). En fait tous les philosophes sérieux nés à la fin du 19 ème ont commencé par être hégéliens, et ont "apostasié" ensuite : exemple Bertrand Russell.

    Jean François Filion, dans son livre "Dialectique et matière", oppose après Hzegel deux sortes de scientifiques : ceux guidés par l'instinct de Raison (réalistes, platoniciens) dont des exemples sont Galilée et Kepler ; et ceux guidés par l'entendement, et la conception nominaliste, qui triomphent avec Newton.

    Citons le :

    "La technoscience doit être considérée comme le fruit non scientifique de la précompréhension ontologique la plus répandue de nos jours : le nominalisme ou phénoménisme"


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